Cela doit faire deux semaines que cet homme à emménager dans l'appartement d'à côté. Il semble vivre seul. Je n'ai jamais vu personne venir chez lui. Ni homme. Ni femme. Oh, je ne suis pas une genre de commère, non, je pense plutôt que je suis observatrice. À force de vivre dans cet immeuble, je commence à connaitre tout le monde, même si... personne ne fait attention à moi... J'ai donc remarqué ce nouvel arrivant, ce nouveau voisin, contrairement à tout le monde. Il faut croire que dans ce quartier tout le monde répond à la loi du chacun pour sois. Moi, je ne suis pas comme ça. Je n'aime pas cette façon de penser. Je ne la comprend pas. C'est peut-être pour ça que j'observe autant les habitants, car j'espère trouver quelqu'un comme moi. Quelqu'un qui pense comme moi. Quelqu'un qui ne pense pas qu'à lui... Comme... Lui ?

En parlant de lui, il semble gravement malade depuis hier. À première vue, je suppose que sa chambre est collée à la mienne. Je n'ai pas arrêté de l'entendre tousser fortement, renifler et beaucoup se moucher. Je ne l'ai pas vu sortir de son appartement en plus, depuis hier. Je ne suis même pas sûr qu'il est de quoi se soigner chez lui, car il ne semble pas aller mieux. J'ai même l'impression que son état empire.

Malade. Personne pour le soigner... Il doit se sentir bien seul. Un sentiment que je connais que trop bien, malheureusement. J'ai eu le cœur serré en pensant à ça. C'est donc pour ça que j'ai pris le soin de lui préparer une bonne soupe aux vermicelles, recette de ma grand-mère adorée, pendant que personne n'était à l'appartement. Je prépara un bon bol, avant de le refermer avec un couvercle en caoutchouc hermétique, pris quelques médicament que je mis dans l'une des poches de ma robe et partir en direction de chez le voisin.

Je tenais le bol d'une main, pendant que l'autre s'occupa de toquer à la porte. Heureusement, le voisin ne mit pas longtemps à venir m'ouvrir.

Bonjour, je m'appelle Maddison. Je suis votre voisine d'à côté et heu... Je vous ai apporté ça.

Je tendis le bol vers le voisin.

Vous avez l'air très malade et...

Sans le vouloir, mon regard se fit plus curieux que moi et je vis un peu l'intérieur de son appartement. Heureusement, je me remis vite à le regarder de nouveau.

Je me suis dit que je pourrais vous tenir un peu compagnie... Si vous voulez, bien sûr.

Je crois que je m'étais faite de fausses idées et surtout de faux espoir sur ce voisin. À la façon dont il me parle... le ton de sa voix... ce qu'il dit... Je ne suis clairement pas la bienvenue... Et moi qui pensais que... Enfin, j'avais espéré que ce voisin ne soit pas comme tous les autres habitants de cet immeuble. Finalement, il semble être comme l'un d'eux. Il faut croire que je suis la seule à ne pas être à ma place ici. Déjà que je me sens pas à ma place dans ma propre famille... Heureusement que j'ai mes clients. Avec eux je me sens moins seule. Ils m'aiment. Ils voient que j'existent. Ils pensent à moi. Contrairement à tout le monde...

Je ne savais quoi répondre devant ses paroles qui m'avaient presque figé sur place. Ce qui me fit réagir c'est de voir mon voisin manquer de tomber. Mon cœur se serra. Il ne semble vraiment pas aller bien. Heureusement, il me demanda son aide pour que je le raccompagne jusqu'à son canapé. Au moins, on peut dire que je ne serais pas venu jusqu'ici pour rien.

Oui, monsieur.

Je posa rapidement le bol par terre et passa l'un de mes bras autour de mon voisin. Je m'avança dans son appartement, tout en le tenant, allant jusqu'à son canapé. Le plus dur, ce n'était pas de le faire avancer, mais plus d'éviter le bazar éparpiller ici et là. Difficilement, je le fis s'asseoir sur le canapé, manquant de tomber sur lui. Heureusement, je réussis à me redresser.

Je reviens tout de suite.

Je retourna rapidement récupérer mon bol soupe, en profitant pour fermer la porte au passage. Je reviens vers mon voisin, venant poser le bol sur sa table basse. Enfin... Il fallu que je pousse un peu ce qui se trouvait dessus pour trouver un peu de place pour le bol. Mon regard s'égara dans cet appartement dont le bazar semblait maitre.

Je... Je vous ai apporté des médicaments aussi.

Je sortis de la poche de ma robe quelques boites de médicaments, que je posa à côté du bol, sur une pile de papier. Pas très stable et... tellement de bazars...

Vous voulez un coup de main pour... le ménage ? J'ai l'habitude chez moi. C'est moi qui m'occupe de tout.

Le voisin me fait un peu penser à papa. Il est froid. Il refuse qu'on l'aide, sauf si c'est lui qui l'ordonne. Bon, au moins, il ne m'a pas encore frappé... Mais bon, peut être que ça, c'est juste parce qu'il est malade et très faible. Dans d'autres circonstances, peut-être que... Peut-être que je me serais pris le bol en pleine figure. La soupe m'aurait à tous les coups brulés le visage. Oui... Il ressemble un peu plus à papa en refusant de prendre les médicaments et en m'affirmant qu'il n'a pas besoin d'aide...

Je le regarde s'endormir sur le canapé, entendant sa respiration rapide et pas très régulière. Il est très malade et... Tout ce bazar autour de lui ne doit pas beaucoup l'aider à se reposer. Bon, je devrais sans doute rentrer chez moi, mais... Je me vois mal l'abandonner. Il semble avoir besoin de moi et... même si il dort... je me sens moins seule avec sa présence...

Je commence à allonger le voisin plus confortablement sur le canapé, plaçant un cousin sous sa tête. Je cherche ensuite un linge propre que j'imbibe d'eau fraiche. En l'allongeant, j'en ai profité pour toucher son front et j'ai vu qu'il avait de la fièvre. L'eau fraiche va aider à faire tomber un peu la fièvre. Je place donc le linge humide sur son front et commence à ranger doucement son appartement, comme il est possible. Je prend soin avec tous les papiers qui trainent, n'osant trop y toucher. Je fais des petites piles sur la table basse, sans tout mélanger. Au moins, aucun risque de trébucher sur l'une de ses feuilles, maintenant.

Je m'occupe ensuite de changer les draps. Je m'occupe également du linge que je lave à la main pour ne faire trop de bruit et laisser dormir le voisin. Et pour finir, je m'occupe de la vaisselle qui traine et qui semble s'être accumulé dans l'évier. Piouf, j'ai un petit coup de barre, mais je me sens bien d'avoir fait tout ça.

Je retourne ensuite regarder le voisin. Il semble dormir si paisiblement. Je touche le linge, il est chaud. Je vais vite le changer, venant en mettre un frais sur son front, de nouveau. Je m'agenouille, ensuite, à côté de lui, le regardant dormir. Il est tellement mignon quand il ne grogne pas. Il semble même... apaisé. Je me demande si j'ai cette même impression quand je dors...

Je baisse les yeux et viens doucement remonter ma robe. Je regarde les hématomes qui couvrent mes jambes. Je me sens tellement moche... C'est bizarre, j'ai l'impression que... Oh, il est réveillé ! Je lâche vite ma robe, en espérant qu'il n'est rien vu.

Re-bonjour ! Vous vous sentez mieux ? Demandais-je en souriant.

J'observe le voisin se réveiller de sa sieste. Il a l'air d'aller mieux. Il retire le linge humide de son front et se redresser. Oh, je devrais peut-être lui dire de rester encore allongé pour le moment, mais... vu comment il grognait tout à l'heure... comme papa... je pense que je ferais mieux de me taire. Je me contente juste de le regarder, toujours à genoux à côté du canapé.

Un léger sourire vient se dessiner sur mes lèvres quand j'entend le voisin me dire merci. Un sourire qui s'agrandit un peu plus quand il dit qu'il se sent mieux. Je me sens soulagée. Le linge humide a dû réussir à faire baisser un peu sa fièvre. Tant mieux.

Alors que je me contente de sourire apaisé, le voisin regardait son appartement rangé. Il me demanda pourquoi j'avais fait tout ça.

Oh, heu... Je... J'allais pas partir, alors... Enfin... Je... Je suis contente que vous alliez mieux.

Je ne savais pas trop quoi répondre. Je me voyais mal lui dire que le peu de présence qu'il m'avait apporté, même en dormant, m'avait fait du bien. Et maintenant qu'il était réveillé, je n'étais pas sûr qu'il accepte que je reste avec lui. Au moins, il semblait beaucoup plus doux à présent et... Pourquoi il me tends de l'argent ? Est-ce... Un client ? Non, je ne pense pas. Il... Il me dit merci ? Il me paye pour le ménage ? Oh, il croit que j'ai fait ça pour de l'argent ?

Oh, non, non, non. Je... Je n'ai pas ça pour l'argent. Disais-je en repoussant doucement ses mains.

Mon sang se glaça quand le voisin parla de ma famille et... qu'il me demanda si elle était violente. Mauvais réflexe, je baissa les yeux pour vérifier si j'avais bien remis ma robe. Je releva aussi vite le regard, me sentant mal à l'aise.

Je... Je ne vois pas de quoi vous...

Et si il avait entendu mon père crier sur moi ? Et si il avait entendu mon corps rencontrer le mur de ma chambre ? Et si il m'avait entendu crier de douleur ? Et si il m'avait entendu pleurer ? Et si...

Parlez...

Je baissa les yeux, me sentant trembler. Je me releva, évitant le regard du voisin.

Vous devriez aller prendre un bain. Ça vous ferait beaucoup de bien et... Mangez la soupe que vous ai ramenée. Vous voulez que je vous la réchauffe ? Lui demandais-je en me mettant dos à lui pour me pencher vers la table basse et prendre le bol de soupe.

Un horrible frisson me parcourra tout le corps quand j'entendis le ton froid de mon voisin résonner dans mes oreilles. J'avala difficilement ma salive devant ses sourcils froncer, ayant l'impression qu'il allait de nouveau grogner d'une seconde à l'autre.

Je... Je voulais juste vous aider... C'est tout... Répondais-je timidement.

Je crois que j'ai réussi à changer de sujet. J'ai détourné la conversation sur mes hématomes pour parler de lui. En plus, il devrait penser à prendre une douche et qu'il mange. Une bonne douche chaude lui ferait le plus grand bien et permettrait aux microbes présents sur lui de partir. Et manger lui donnerait des forces. Bon, malheureusement, le voisin refusa que je l'aide plus.

Je me stoppa net, le bol de soupe à la main, quand j'entendis le voisin me dire qu'il était détective privé et... qu'il sait quand quelqu'un lui ment. Il dit ça pour bluffer ou... Il a réellement ce pouvoir ? En plus, il me dit que je peux porter plainte contre ma famille... Je n'ose rien répondre. Je me sens comme paralysé. Si papa apprend ça... Il... Il...

Mad... Maddison... Répondais-je d'une voix tremblante. Maddison Lawrence.

Je me sentais pas bien. J'avais peur. Est-ce qu'il pourrait parler à papa ? Papa serait tellement furieux. Je déteste quand il est en colère. Il me fait tellement mal... Je veux pas qu'il me frappe... Non... Je tremble de plus en plus.

Je... Je vais réchauffer la soupe.

Sans attendre son autorisation, j'alla dans la cuisine, rapidement. Je pris une grande respiration en arrivant dans la pièce. Je sentais les larmes me monter aux yeux. Il faut pas que je pleure. Papa ne serait rien. Le voisin bluff peut être. Je dois continuer à mentir. Tout ira bien. Je prend une grande inspiration, le temps que le microonde réchauffe la soupe. Je prend ensuite une cuillère propre et je retourne le voir en souriant. J'avale ma peur et je revient en souriant.

Et voilà, la soupe. Vous devriez ça vous ferait beaucoup de bien.

Je m'assis à côté de lui et lui tendis la soupe.

Au fait, vous m'avez pas dit votre nom.